parties en présence, et surtout de ne pas peser de tout son poids, qui n’est pas médiocre, dans la balance.
Tout le monde trouverait étrange qu’il vînt commanditer ou subventionner un particulier au détriment de ses concurrents .
*
* *
C est d’ailleurs ce qu’a toujours fort bien compris le Ministère des Travaux publics; et les vérités ainsi rappelées par M. Moreau, les ministres successifs les ont, à plusieurs reprises, exprimées très nettement et très formellement dans plusieurs circulaires.
Celle-ci entre autres, de 1899, qui n’a pas ou, par conséquent, le temps de tomber on complète désuétude :
« Par circulaire du 14 mai 1897, l’Administration a rappelé aux fonctionnaires du Ministère dos Travaux publics qu’il leur était interdit de se livrer à des occupations com
merciales, soit ouvertement, soit sous le couvert de prêtenoms, et qu’ils devaient toute leur activité au service de l’État. »
Laissons de côté les occupations commerciales, sur la nature et le caractère desquelles on pourrait conlroverser à la rigueur. Mais le ministre rappelait un principe beaucoup plus général encore, beaucoup plus absolu : Les fonctionnaires doivent à l État toute leur activité.
Rien de plus juste et de plus naturel d’ailleurs : Des privilèges justement mérités, do hautes distinctions obtenues par le mérite, le travail, l’expérience et l’autorité acquises, sont réservés à ces fonctions. Il est très équitable que ces droits incontestés aient comme contrepoids des obligations; et celles-ci se résument toutes en ce paragraphe unique et très
simple : les fonctionnaires doivent à l’Etat leur activité tout entière.
*
* *
Les recommandations et les rappels du ministre sont donc très nets et très formels, au moins en principe.
Dans la pratique, ils ont toujours laissé la porto quelque peu ouverte aux exceptions; et, malheureusement, il arrive trop souvent qu’une porte laissée entr’ouverte par l’Adminis
tration, pont s’ouvrir toute grande au moindre vont. Quand une roglo, très absolue lorsqu’elle est formulée, reste sujette à interprétation, il y a dix chances contre une pour que l’interprétation arrive promptement à fausser la règle, aussi bien dans son principe que dans l’application.
Or, voici, dans celle môme circulaire administrative du 28 septembre 1899, le paragraphe dangereux, et qui a donné ouverturo à dos commentaires ot traductions préfectorales qui on dénaturent le sens.
Le ministre ajoutait bien : « Saisi d’un certain nombre do plaintes émanant do particuliers, je crois devoir insister pour
que los prescriptions concernant les occupations étrangères au service (travaux particuliers, affaires commerciales, expertises, olc.) soient scrupuleusement observées. »
Mais il ajoutait aussitôt : « Pour celles de cos occupations qui no sont pas frappées do prohibition absolue, et qui restent simplement subordonnées à l’obtention d’une autorisation préalable, je désire que le rapport produit par les ingénieurs sur la demande d’auforisation me mette à môme d’apprécier
si des réclamations sont à redouter de la part des architectes et des gens de l’art patentés de la localité. »
Au premier aspect, cette nouvelle recommandation paraît tout aussi sage et équitable que les précédentes, tout aussi formelle également. Tout le monde admettra parfaitement que les fonctionnaires des Ponts et Chaussées puissent utiliser parfois leur grande expérience, en dehors de leurs occupa
tions habituelles, dans des circonstances très particulières où leur intervention ne peut et ne doit porter ombrage aux:
intérêts de personne; et, au contraire, pour le bien de tous.
Il n’en faut pas moins, et toujours, une autorisation; préalable, sur demande pleinement justifiée; et cette auto
risation ne doit être accordée qu’après examen très attentif; des intérêts qui ne doivent pas être lésés.
* *
Il semble bien qu’il n’y ait pas d’autre manière de comprendre la déclaration ministérielle. Néanmoins certains préfets l’interprètent de façon toute différente.
Il faut, disent-ils, une autorisation préalable? Fort bien ; ce n’est qu’une formalité à remplir. La formalité une fois remplie, rien n’empêche plus que nous soyons, à notre tour,
pleinement autorisés à faire tout le contraire de ce que nous recommande le Ministère avec tant d’insistance.
Il est même assez piquant de relever les façons très diffé
rentes dont, suivant le département, chaque préfet apporte son commentaire aux prescriptions administratives.
Tandis que le Préfet des Hautes-Alpes, sans chercher d’autre substilité, en octobre 1899 interdisait dans son dépar
tement de dresser projets, plans et devis, ou de s’occuper do tout travail étranger au service, sauf à litre absolument exceptionnel et seulement pour des ouvrages de peu d’importance ;
Tandis que M. le Préfet de l’Yonne, abondant dans le même sens, qui est bien celui de la circulaire ministérielle,
rappelait que les divers fonctionnaires du service public ont d’assez importantes fonctions pour qu’elles suffisent à occuper tout leur temps et toute leur activité, ot recommandait aux maires de porlor toujours leurs choix sur les archi
tectes payant patente, dont la liste était communiquée à ces mômes maires ;
Voici comment on opérait dans le département de l’Ailier.
*


* *


En 1891, lo Conseil général y demandait que toutes les constructions départementales fussent mises au concours.
Mais, en 1893, les avis avaient changé, paraît-il; il est à supposer que des conseils influents avaient contribué à ce rovircmcnt; car lorsqu’on oui. à faire construite deux nouveaux bâtiments pour l’asile Sainte-Catherine, la Commission du môme Conseil vint déclarer :
« M. lo Préfet vous demande que les travaux, qui ne pouvont so prêter à uno adjudication, soionl oxéculés
on régie sous la surveillance des agents de M. l’Ingénieur en chef qui veut bien se mettre à la disposition du département. »
Quels sont cos travaux, d’une nature si particulière, qu’ils no so prêtent à aucune adjudication? Nous l’ignorons com