ploiement. Mais, si la régie était nécessaire, pourquoi fallaitil qu’elle se fît, contrairement aux prescriptions ministé
rielles, sous les ordres de M. l’Ingénieur en chef, et non d’un architecte?
Car, enfin, la construction d’un asile semble rentrer sous la compétence d’un architecte au moins aussi facilement que sous celle d’un ingénieur en chef, quelle que soit, d’ailleurs,
la grande autorité certainement acquise par celui-ci dans l’exercice de ses fonctions ordinaires.
La dépense s’étant élevée à 325.000 francs, il semble également que des travaux de ce genre éprouveraient, de leur côté, quelque difficulté à rentrer dans la définition qu’em
ployait le préfet des Hautes-Alpes : ouvrages de peu d’importance.
* *
Que les travaux aient été fort bien exécutés, nous n’en doutons nullement; mais là n’est pas la question.
On ne saurait pas davantage mettre en question le dévouement et le désintéressement de M. l’Ingénieur en chef et de son personnel qui purent prélever, sur leurs
nombreuses et très importantes occupations, tout le temps nécessaire pour étudier et faire exécuter, avec un soin évidemment scrupuleux, une œuvre aussi considérable.
Aussi n’était-il que juste, de la part du Conseil départemental, de reconnaître et récompenser, comme il le fit, ce dévouement par une allocation de 7.000 francs, — somme
relativement peu élevée. Seulement, était-il bien nécessaire d’ajouter, pour justifier mieux encore cette « gratification », que le travail avait été exécuté sans augmentation de traitement, et sans frais de personnel?
Du moment qu’à co travail étaient employés les agents de l’État, sous les ordres de M. l’Ingénieur en chef, il est clair qu’il n’y avait eu, pour le département, aucun frais de personnel; — puisque c’est l’Etat qui payait celui-ci.
Il résulte do là qu’effective ment les finances départementales avaient fait do sérieuses économies ; mais que c était aux dépens des finances de l’Etat.
Evidemment, un architecte aurait pu demander une plus forte indemnité, s’il lui avait fallu payer lui-même son agence; mais on aurait tort d’employer cette économie,
plutôt fictive, coramo argument contre les architectes en général cl les dépenses qu’ils occasionnent.
Mais comment se fait-il que, dans l’Ailier, on se préocupe aussi peu des réclamations que les architectes et gens do l’art patentés auraient le droit d’exercer? Ce droit n’était-il pas reconnu par le ministre lui-même?
Le cas était intéressant à observer, comme on voit. Pour ne pas fatiguer l’attention de nos lecteurs, nous remettrons à un prochain article la suite du travail de M. Moreau, qui vient de paraître dans le même Bulletin.
P. PLANAT.
Los organisateurs du Salon d’Aulomno, qui ne sont pas ennemis d’une juste publicité, ont été servis à souhait cette année. Toute la^resso a retenti de leurs démêlés avec la
Société Nationale des Beaux-Arts, société jadis à l’avantgarde du mouvement artistique, mais qui n’est plus, aujourd’hui, paraît-il, composée que de pompiers, et même d’aca
démiciens. C’est du moins M. Thiébault-Sisson qui l’affirme dans son compte rendu enthousiaste de l’exposition actuelle.
« Le souvenir, dit-il, me reporte, malgré moi, de quatorze ans et plus en arrière, à l ouverture, en mai 1890, du premier Salon du Champ-de-Mars. Je revis celte heure enthou
siaste, et, au passé, je compare le présent. Où est-il ce monde nouveau dont je saluais l’aurore avec joie? Quelles
vieilles lunes est-il allé rejoindre? Poncif déjà le vieux Champ-de-Mars, et comme les Artistes Français, succursale déjà de l’Institut ! »
Pauvre Carolus! Nous l’avons vu hier, courbé et blanchi sous cette excommunication majeure, errer solitairement parmi les salles do la concurrence. Lui et les siens furent naguère des révolutionnaires ; « mais, dit toujours le critL
que du Temps, les conventionnels qui ne sont pas tombés sous le couperet meurent toujours pairs de France ».
Est-ce un regret qu’émet ainsi le sympathique salonnier? C’est tout au moins l’indication qu’en art comme en politique il faul constamment évoluer sous peine de passer au rang do vieille perruque. Telle est la théorie actuelle, qui aurait peut-être surpris Phidias, Raphaël ou Rembrandt. Aujour
d’hui il faul sans cesse changer sa manière, se créer chaque année un idéal nouveau, et justifier cette maxime philoso
phique que le moi est un perpétuel devenir. Pas de formules,
à peine de personnalité; se conformer à la mode, ou mieux la devancer, tel est lo programme si l on veut être dans le mouvement (soixante à l’heure, en palier). A ce train-là on
ne détient pas longtemps le record. Les triomphateurs du jour ne se font aucune illusion sur le sort qui les attend. Avant d’entrer à l’Institut, ce qui est lo suprême châtiment,
ils verront bientôt, demain peut-êlre, les jeunes former un groupement plus progressiste. On annonce que des artistes refusés au Salon d’Automne (il y on a, paraît-il) ont l’inten
tion de fonder un Salon d’Hiver. Et ce Salon aura des salon
niers et un public. Car le public, malgré la multiplicité des expositions, ne se lasse pas.
Les visiteurs ont raison, car au Salon d’automne, comme aux autres Salons, les belles œuvres ne sont pas rares, et il y a toujours grand intérêt à suivre le mouvement de la jeune école. Cependant, une sélection plus attentive ne donnerait que plus do force à cotte manifestation artistique. Elle évite
rait bien des sourires, trop justifiés, comme le reconnaît M. Thiébault-Sisson lui-même qui traite certaines œuvres de gageures.
On sait que le Salon est installé au Grand Palais, dans les salles réservées, au printemps, à l’Exposition do la Société nationale des Beaux-Arts. Quelques tentures neuves, heu
reusement choisies, rajeunissent le local. Malheureusement,
ces salles, déjà peu éclairées on plein été, sont à peu près obscures dans la saison actuelle. Ce manquo de lumière nuit à la bonne appréciation qu’on peut faire dos toiles,
œuvres qui ont été conçues an grand jour de l’atelier, et que cotte demi-obscurité est loin de mettre on valeur. Néanmoins, l’installation actuello est de beaucoup préférable à celle de
rielles, sous les ordres de M. l’Ingénieur en chef, et non d’un architecte?
Car, enfin, la construction d’un asile semble rentrer sous la compétence d’un architecte au moins aussi facilement que sous celle d’un ingénieur en chef, quelle que soit, d’ailleurs,
la grande autorité certainement acquise par celui-ci dans l’exercice de ses fonctions ordinaires.
La dépense s’étant élevée à 325.000 francs, il semble également que des travaux de ce genre éprouveraient, de leur côté, quelque difficulté à rentrer dans la définition qu’em
ployait le préfet des Hautes-Alpes : ouvrages de peu d’importance.
* *
Que les travaux aient été fort bien exécutés, nous n’en doutons nullement; mais là n’est pas la question.
On ne saurait pas davantage mettre en question le dévouement et le désintéressement de M. l’Ingénieur en chef et de son personnel qui purent prélever, sur leurs
nombreuses et très importantes occupations, tout le temps nécessaire pour étudier et faire exécuter, avec un soin évidemment scrupuleux, une œuvre aussi considérable.
Aussi n’était-il que juste, de la part du Conseil départemental, de reconnaître et récompenser, comme il le fit, ce dévouement par une allocation de 7.000 francs, — somme
relativement peu élevée. Seulement, était-il bien nécessaire d’ajouter, pour justifier mieux encore cette « gratification », que le travail avait été exécuté sans augmentation de traitement, et sans frais de personnel?
Du moment qu’à co travail étaient employés les agents de l’État, sous les ordres de M. l’Ingénieur en chef, il est clair qu’il n’y avait eu, pour le département, aucun frais de personnel; — puisque c’est l’Etat qui payait celui-ci.
Il résulte do là qu’effective ment les finances départementales avaient fait do sérieuses économies ; mais que c était aux dépens des finances de l’Etat.
Evidemment, un architecte aurait pu demander une plus forte indemnité, s’il lui avait fallu payer lui-même son agence; mais on aurait tort d’employer cette économie,
plutôt fictive, coramo argument contre les architectes en général cl les dépenses qu’ils occasionnent.
Mais comment se fait-il que, dans l’Ailier, on se préocupe aussi peu des réclamations que les architectes et gens do l’art patentés auraient le droit d’exercer? Ce droit n’était-il pas reconnu par le ministre lui-même?
Le cas était intéressant à observer, comme on voit. Pour ne pas fatiguer l’attention de nos lecteurs, nous remettrons à un prochain article la suite du travail de M. Moreau, qui vient de paraître dans le même Bulletin.
P. PLANAT.
LE SALON D’AUTOMNE
Los organisateurs du Salon d’Aulomno, qui ne sont pas ennemis d’une juste publicité, ont été servis à souhait cette année. Toute la^resso a retenti de leurs démêlés avec la
Société Nationale des Beaux-Arts, société jadis à l’avantgarde du mouvement artistique, mais qui n’est plus, aujourd’hui, paraît-il, composée que de pompiers, et même d’aca
démiciens. C’est du moins M. Thiébault-Sisson qui l’affirme dans son compte rendu enthousiaste de l’exposition actuelle.
« Le souvenir, dit-il, me reporte, malgré moi, de quatorze ans et plus en arrière, à l ouverture, en mai 1890, du premier Salon du Champ-de-Mars. Je revis celte heure enthou
siaste, et, au passé, je compare le présent. Où est-il ce monde nouveau dont je saluais l’aurore avec joie? Quelles
vieilles lunes est-il allé rejoindre? Poncif déjà le vieux Champ-de-Mars, et comme les Artistes Français, succursale déjà de l’Institut ! »
Pauvre Carolus! Nous l’avons vu hier, courbé et blanchi sous cette excommunication majeure, errer solitairement parmi les salles do la concurrence. Lui et les siens furent naguère des révolutionnaires ; « mais, dit toujours le critL
que du Temps, les conventionnels qui ne sont pas tombés sous le couperet meurent toujours pairs de France ».
Est-ce un regret qu’émet ainsi le sympathique salonnier? C’est tout au moins l’indication qu’en art comme en politique il faul constamment évoluer sous peine de passer au rang do vieille perruque. Telle est la théorie actuelle, qui aurait peut-être surpris Phidias, Raphaël ou Rembrandt. Aujour
d’hui il faul sans cesse changer sa manière, se créer chaque année un idéal nouveau, et justifier cette maxime philoso
phique que le moi est un perpétuel devenir. Pas de formules,
à peine de personnalité; se conformer à la mode, ou mieux la devancer, tel est lo programme si l on veut être dans le mouvement (soixante à l’heure, en palier). A ce train-là on
ne détient pas longtemps le record. Les triomphateurs du jour ne se font aucune illusion sur le sort qui les attend. Avant d’entrer à l’Institut, ce qui est lo suprême châtiment,
ils verront bientôt, demain peut-êlre, les jeunes former un groupement plus progressiste. On annonce que des artistes refusés au Salon d’Automne (il y on a, paraît-il) ont l’inten
tion de fonder un Salon d’Hiver. Et ce Salon aura des salon
niers et un public. Car le public, malgré la multiplicité des expositions, ne se lasse pas.
Les visiteurs ont raison, car au Salon d’automne, comme aux autres Salons, les belles œuvres ne sont pas rares, et il y a toujours grand intérêt à suivre le mouvement de la jeune école. Cependant, une sélection plus attentive ne donnerait que plus do force à cotte manifestation artistique. Elle évite
rait bien des sourires, trop justifiés, comme le reconnaît M. Thiébault-Sisson lui-même qui traite certaines œuvres de gageures.
On sait que le Salon est installé au Grand Palais, dans les salles réservées, au printemps, à l’Exposition do la Société nationale des Beaux-Arts. Quelques tentures neuves, heu
reusement choisies, rajeunissent le local. Malheureusement,
ces salles, déjà peu éclairées on plein été, sont à peu près obscures dans la saison actuelle. Ce manquo de lumière nuit à la bonne appréciation qu’on peut faire dos toiles,
œuvres qui ont été conçues an grand jour de l’atelier, et que cotte demi-obscurité est loin de mettre on valeur. Néanmoins, l’installation actuello est de beaucoup préférable à celle de