d’intérêt que pour les archéologues et les historiens;
L édifice vivant, celui qui a conservé sa destination primitive .
Dans la première catégorie il iaudrait classer : soit un temple antique, soit une forteresse féodale, ou une église désaffectée. Sur ces édifices-là il faut veiller attentivement, il faut les entourer de gardes qui s’opposeront à toute dégra
dation malfaisante, en relier les pierres par du fer; il faut les étayer au besoin, si laids que puissent être les étais. Cela
fait, et rien de plus, il faut, avec tendresse et respect, les laisser périr de leur belle mort, sans leur porter d’autre secours.
Dans la seconde catégorie, on classera les hôtels de ville habitables et habités, les palais de justice où l’on plaide en
core, les églises que continuent à fréquenter les fidèles. Ceuxlà il faut les entretenir; il faut y remplacer les parements, les colonnes, les voûtes : « Il laudra réparer la construction,
c’est-à-dire assurer sa solidité et la maintenir dans un tel état qu’elle puisse continuer de rendre les services en vue desquels elle fut conçue ».
Lorsqu’on devra remplacer une colonne, par exemple, la forme et les dimensions de la colonne nouvelle devront reproduire fidèlement et exactement la forme et les dimensions de la colonne primitive : ce sont là des nécessités architectoniques.
Mais, pour rien au monde, il ne faudra la surmonter d’un chapiteau qui soit la copie d’un chapiteau voisin. M. Hal
lays dit formellement : « Si les artistes de maintenant sont incapables d’originalité, qu’ils laissent donc ce bloc de pierre à l’état brut. Ce sera du moins un loyal aveu d’impuissance ».
*
* *
Cette classification est fort rationnelle en soi; mais nous demandons à présenter quelques observations sur les conséquences et l’application qu’en veut faire M. Hallays.
Tout d’abord, et presque incidemment, il nous semble que celui-ci n’est pas parfaitement d’accord avec lui-même quand il dit : « Si les artistes modernes manquent d’origina
lité, qu’ils laissent les chapiteaux à l’état brut, comme aveu de leur impuissance . »
Bien. — Mais s’ils ne manquent pas d’originalité, demanderons-nous? Car enfin cela peut arriver, même à quelques architectes des temps modernes. Au besoin il pourrait même suffire qu’ils le crûssent.
Il est entendu que les autres doivent s’astreindre au pénible aveu que leur conseille M. Hallays. Mais que doivent faire les artistes doués de quelque originalité? Ils n’ont évi
demment pas d’impuissance à avouer; dès lors, pas des chapiteaux à laisser bruts? Seront-ils autorisés par les Débats à fouiller, sculpter, ciseler les chapiteaux au gré de leur originalité?
Evidemment non, puisque M. Hallays l’interdit. Alors quoi?
*
Cette restriction demande donc a être plus clairement définie. Mais passons sur cet incident sans grande importance pour en venir à la classification elle-même.
liers. Ceux-là il faut bien les maintenir habitables, c’est évident; donc il faut aussi les restaurer. Là n’est pas encore la difficulté.
Il est des édifices sans emploi, cela est également certain. Ceux-là on nous conseille de les laisser périr, doucement, sans violences, avec toutes les marques de respectueux regrets que pourrait manifester un neveu qui va hériter de son oncle.
Et cela simplement parce qu’on les considère comme de vieux outils hors d’usage.
Voilà précisément contre quoi nous demandons à protester :
Si la classification indiquée est juste, il en est une autre qui ne l’est pas moins, bien qu’elle soit d’un toutautre ordre.
Celte claseification, qui a bien son importance également, la voici selon nous.
Il est des édifices remarquablement beaux, il en est de particulièrement intéressants pour l’histoire de notre art.
Il en est d’autres dont la beauté ne saute pas immédiatement aux yeux et dont l’intérêt, historique ou archéologique, est relativement médiocre.
Il nous semble que c’est celte distinction qui doit primer toutes les autres. Qu’un très bel ou très curieux édifice n’ait plus l’honneur de recevoir les plaideurs modernes ou les conseillers municipaux dont nous avons, de notre côté, l’honneur d’être les contemporains, cette considération ne nous suffit pas pour prononcer sur lui la peine de mort, sans recours en grâce.
Qu’un monument médiocre soit conservé, entretenu parce qu’il sert encore à quelque chose, nous y souscrivons bien volontiers. Mais qu’un édifice remarquable soit condamné uniquement parce qu’il n’a plus de destination, c’est ce que, contrairement à l’opinion de M. Hallays, nous n’admettons pas.
brutale. A notre avis, il conviendrait assez de la doubler de cette autre classification, relative à la beauté ou à l’intérêt de l’édifice même sur le sort duquel on doit se prononcer :
Édifices vivants ; conservez-les tous sans exception; nous n’y voyons aucun inconvénient;
Édifices morts ; s’ils sont remarquables, conservez-les avec autant de soin, pour le moins, que les précédents. S’ils sont d’un médiocre intérêt, nous les abandonnons sans trop de
regrets à leur destin, puisque le budget ne permet pas de tout entretenir.
S’il faut donc faire un choix, telle est la façon dont nous choisirions. Nous ne condamnerions pas un chef-d’œuvre d architecture, uniquement parce qu’il ne peut pas servir de mairie ou de groupe scolaire. P. Planat.
LE PALAIS DE LONGCHAMP. On nous écrit :
Permettez-moi quelques mots de réponse à l’article inséré dans le dernier numéro de votre estimable publication La
L édifice vivant, celui qui a conservé sa destination primitive .
Dans la première catégorie il iaudrait classer : soit un temple antique, soit une forteresse féodale, ou une église désaffectée. Sur ces édifices-là il faut veiller attentivement, il faut les entourer de gardes qui s’opposeront à toute dégra
dation malfaisante, en relier les pierres par du fer; il faut les étayer au besoin, si laids que puissent être les étais. Cela
fait, et rien de plus, il faut, avec tendresse et respect, les laisser périr de leur belle mort, sans leur porter d’autre secours.
Dans la seconde catégorie, on classera les hôtels de ville habitables et habités, les palais de justice où l’on plaide en
core, les églises que continuent à fréquenter les fidèles. Ceuxlà il faut les entretenir; il faut y remplacer les parements, les colonnes, les voûtes : « Il laudra réparer la construction,
c’est-à-dire assurer sa solidité et la maintenir dans un tel état qu’elle puisse continuer de rendre les services en vue desquels elle fut conçue ».
Lorsqu’on devra remplacer une colonne, par exemple, la forme et les dimensions de la colonne nouvelle devront reproduire fidèlement et exactement la forme et les dimensions de la colonne primitive : ce sont là des nécessités architectoniques.
Mais, pour rien au monde, il ne faudra la surmonter d’un chapiteau qui soit la copie d’un chapiteau voisin. M. Hal
lays dit formellement : « Si les artistes de maintenant sont incapables d’originalité, qu’ils laissent donc ce bloc de pierre à l’état brut. Ce sera du moins un loyal aveu d’impuissance ».
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Cette classification est fort rationnelle en soi; mais nous demandons à présenter quelques observations sur les conséquences et l’application qu’en veut faire M. Hallays.
Tout d’abord, et presque incidemment, il nous semble que celui-ci n’est pas parfaitement d’accord avec lui-même quand il dit : « Si les artistes modernes manquent d’origina
lité, qu’ils laissent les chapiteaux à l’état brut, comme aveu de leur impuissance . »
Bien. — Mais s’ils ne manquent pas d’originalité, demanderons-nous? Car enfin cela peut arriver, même à quelques architectes des temps modernes. Au besoin il pourrait même suffire qu’ils le crûssent.
Il est entendu que les autres doivent s’astreindre au pénible aveu que leur conseille M. Hallays. Mais que doivent faire les artistes doués de quelque originalité? Ils n’ont évi
demment pas d’impuissance à avouer; dès lors, pas des chapiteaux à laisser bruts? Seront-ils autorisés par les Débats à fouiller, sculpter, ciseler les chapiteaux au gré de leur originalité?
Evidemment non, puisque M. Hallays l’interdit. Alors quoi?
*
* *
Cette restriction demande donc a être plus clairement définie. Mais passons sur cet incident sans grande importance pour en venir à la classification elle-même.
Il y a des édifices qui servent encore aux usages journa
liers. Ceux-là il faut bien les maintenir habitables, c’est évident; donc il faut aussi les restaurer. Là n’est pas encore la difficulté.
Il est des édifices sans emploi, cela est également certain. Ceux-là on nous conseille de les laisser périr, doucement, sans violences, avec toutes les marques de respectueux regrets que pourrait manifester un neveu qui va hériter de son oncle.
Et cela simplement parce qu’on les considère comme de vieux outils hors d’usage.
Voilà précisément contre quoi nous demandons à protester :
Si la classification indiquée est juste, il en est une autre qui ne l’est pas moins, bien qu’elle soit d’un toutautre ordre.
Celte claseification, qui a bien son importance également, la voici selon nous.
Il est des édifices remarquablement beaux, il en est de particulièrement intéressants pour l’histoire de notre art.
Il en est d’autres dont la beauté ne saute pas immédiatement aux yeux et dont l’intérêt, historique ou archéologique, est relativement médiocre.
Il nous semble que c’est celte distinction qui doit primer toutes les autres. Qu’un très bel ou très curieux édifice n’ait plus l’honneur de recevoir les plaideurs modernes ou les conseillers municipaux dont nous avons, de notre côté, l’honneur d’être les contemporains, cette considération ne nous suffit pas pour prononcer sur lui la peine de mort, sans recours en grâce.
Qu’un monument médiocre soit conservé, entretenu parce qu’il sert encore à quelque chose, nous y souscrivons bien volontiers. Mais qu’un édifice remarquable soit condamné uniquement parce qu’il n’a plus de destination, c’est ce que, contrairement à l’opinion de M. Hallays, nous n’admettons pas.
Pour nous, la classification proposée et admise plus haut est imparfaite, incomplète tout au moins, et quelque peu
brutale. A notre avis, il conviendrait assez de la doubler de cette autre classification, relative à la beauté ou à l’intérêt de l’édifice même sur le sort duquel on doit se prononcer :
Édifices vivants ; conservez-les tous sans exception; nous n’y voyons aucun inconvénient;
Édifices morts ; s’ils sont remarquables, conservez-les avec autant de soin, pour le moins, que les précédents. S’ils sont d’un médiocre intérêt, nous les abandonnons sans trop de
regrets à leur destin, puisque le budget ne permet pas de tout entretenir.
S’il faut donc faire un choix, telle est la façon dont nous choisirions. Nous ne condamnerions pas un chef-d’œuvre d architecture, uniquement parce qu’il ne peut pas servir de mairie ou de groupe scolaire. P. Planat.
CORRESPONDANCE
LE PALAIS DE LONGCHAMP. On nous écrit :
Monsieur le Directeur,
Permettez-moi quelques mots de réponse à l’article inséré dans le dernier numéro de votre estimable publication La