qu’à partir de trente mille francs de rente!...
Sans vouloir prendre ici là défense de nos maîtres, défense dont ils n’ont aucun besoin, c’est, nous semble-t-il, mal connaître l’École des Beaux-Arts et ses honorables profes
seurs, que de prétendre une pareille énormité. M. Lumet se trompe; il se trompe et induit en erreur ses lecteurs, car il
ne connaît même pas les conditions et les formalités du concours en question. Il ignore que les secours sont fixés par le conseil d’après les demandes motivées, faites par les élèves mêmes, et contrôlées par leurs professeurs qui n’ont aucun intérêt de préférer un élève aisé à un élève pauvre.
A. G.


LE PALAIS DE JUSTICE DE POITIERS


Il y a deux manières de publier des Mémoires : on peut les faire paraître de son vivant; on peut, au contraire, les léguer à la postérité, en fixant même à longue échéance la date de leur apparition. Ce second procédé vous met à l’abri de toute revendication; c’est un avantage, malheureusement com
pensé par l’ennui de ne pas assister au petit effet que l’on escompte en rédigeant des révélations sensationnelles.
Aujourd’hui, où chacun est pressé, la première méthode est beaucoup plus en faveur. Il n’est pas de personnage ayant appartenu à la politique, à l’administration ou à l’armée, qui sitôt rendu à la vie privée, n’en profite pour raconter un peu indiscrètement ce qu’il a vu pendant sa carrière. Le plus souvent ces souvenirs sont entachés d’une cei laine amertume, et la bienveillance y subit de fâcheuses éclipses.
C’est, au contraire, avec plaisir que l’on lit les notes pleines de bonne humeur que fait paraître, depuis sa retraite, M. Roujon, ancien directeur des Beaux-Arts.
Quittant, sans s’y être trop longtemps attardé, des fonctions dont les distractions sont aussi fatigantes que les travaux, M. Roujon n’en a gardé qu’un agréable souvenir.
Dans les confidences qu’il fait à la presse, amis et ennemis sont également bien traités, nous voulons dire avec esprit.
Lorsque, abandonnant ses souvenirs, il parle des faits du jour, il les envisage avec la même bonne humeur, et il les apprécie avec la compétence d’un surintendant des Beaux- Arts, qui fût pénétré de sa mission.
Ecoutons donc les commentaires que lui a suggérés la lecture d’un nouvel ouvrage de M. Lucien Magne, le Palais de Justice de Poitiers.


Naguère M. Roujon fut mêlé, dit-il, à toute une petite campagne administrative, qui eut ses difficultés et ses joies.


Bien souvent dans sa carrière, il eut à donner son avis sur les restaurations de nos monuments. Son opinion en ces matières, qui prévaut aujourd’hui, est également, paraît-il,
celle de M. Magne. « Sa mission d’inspecteur général l’appelle sur tous les points du territoire où il y a un monu
ment historique blessé par accident, ou malade de vieillesse. C’est là une médecine où le diagnostic est souvent obscur,
et la thérapeutique délicate ; on procédait volontiers jadis par opérations chirurgicales, et plus d’un patient survit tant bien que mal, avec un ventre de métal, ou une jambe de bois. La méthode hygiénique prévaut désormais, et c’est une précieuse conquête ».
Il est certain que « arracher n’est pas guérir », surtout lorsque les parties que l’on arrache sont saines et bien vivantes, comme on le fit trop souvent il y a près d’un demisiècle. Il fut un temps où la fureur des restaurations s’acharna sur nos plus beaux édifices de l’époque gothique.
Les restaurateurs voulurent les reconstituer, non pas tels
qu’ils étaient au xme siècle, mais tels qu’ils auraient dû
Maison maternelle, rue Manin, à Paris. — Architectes : MM. Jandelle et Hommet. — Préaux couverts.