5 NOVEMBRE 1904
LA CONSTRUCTION MODERNE
DIRECTION DE L’ÉCOLE DE ROME
Le vénérable et très vénéré M. Guillaume ne sera plus directeur à la Villa Médicis ; sa démission a été acceptée, avec de grands regrets, nous en sommes convaincus, mais enfin acceptée.
Les candidats ne manquent pas, leurs noms sont connus ; il en est d’inattendus, non pas que les artistes qui portent ces noms soient dépourvus de mérite; mais le genre de ce mérite n’est guère celui qu’on exige ordinairement des per
sonnes qui sont chargées de diriger l’établissement qu’on appelle volontiers l’Académie de Rome.
Le choix étant désormais délicat entre des compétiteurs dignes d égards, l’Académie (de Paris) a nommé une com
mission, comme il sied et comme il est de tradition en
pareil cas. Cette commission, qui est mixte, puisque la plupart des arts y sont représentés, se composera de :
M. Bonnat, pour la peinture ;
M. Guillaume, pour la sculpture ; M. Daumet, pour l’architecture; M. Chaplain, pour la gravure; M. Reyer, pour la musique.
M. Gruyer représente les membres libres.
Le 12 de ce mois de novembre, la commission, ayant fixé son choix, le fera connaître.
M. Raoul Aubry a jugé l’occasion favorable pour interroger M. Guillaume (on n’interviewait guère dans sa jeu
nesse); mais comme celui-ci est l’affabilité en personne, et conserve toutes les traditions et les grâces de l’ancienne
politesse française, il a reçu le journaliste on toute aménité et lui a répondu sur toutes les questions qu’il lui plaisait de poser.
Nous ne citerons ici, bien enlondu, que quelques-unes des questions et des réponses.
— Ne projette-t-on pas quelques réformes à la Villa Médicis?
— Qu’appelez-vous des réformes?
Tel fut le début du dialogue. Pour naturelle qu’elle soit, la réponse était presque astucieuse, car tout le monde réclame des réformes, et nous ne cessons d’en réclamer aux dieux mêmes; le difficile est justement d’en préciser la nature et le sens.
Le journaliste s’en lira adroitement par cette remarque générale, peu compromettante et qui ne peut blesser personne :
— Nous appelons réformes cet incessant besoin qu’ont les hommes de changer ce qui existe, s’imaginant que ce qu’ils apporteront sera mieux...
Comme La Rochefoucauld lui-même n’eût pu exprimer une plus juste maxime, M. Guillaume s empressa d’acquiescer,
déclarant d’ailleurs que les élèves de Rome ont toute leur liberté. Etant libres, le besoin de réformes en leur faveur ne s’impose guère, estime le directeur de l’Ecole romaine :
— Ainsi, le pensionnaire se lève quand il veut. Quand une fois il est levé, il a devant lui un cadre harmonieux, de vastes jardins ; la poésie et les souffles inspirateurs montent de partout et l’imagination s’éveille.
En un mot, l’existence là-bas est une idylle; M. Guillaume pourrait bien avoir raison, lors même que les jeunes
2e Série. 10e Année. No 6.
XXe Année de la Collection.
LA CONSTRUCTION MODERNE
ACTUALITÉS
DIRECTION DE L’ÉCOLE DE ROME
Le vénérable et très vénéré M. Guillaume ne sera plus directeur à la Villa Médicis ; sa démission a été acceptée, avec de grands regrets, nous en sommes convaincus, mais enfin acceptée.
Les candidats ne manquent pas, leurs noms sont connus ; il en est d’inattendus, non pas que les artistes qui portent ces noms soient dépourvus de mérite; mais le genre de ce mérite n’est guère celui qu’on exige ordinairement des per
sonnes qui sont chargées de diriger l’établissement qu’on appelle volontiers l’Académie de Rome.
Le choix étant désormais délicat entre des compétiteurs dignes d égards, l’Académie (de Paris) a nommé une com
mission, comme il sied et comme il est de tradition en
pareil cas. Cette commission, qui est mixte, puisque la plupart des arts y sont représentés, se composera de :
M. Bonnat, pour la peinture ;
M. Guillaume, pour la sculpture ; M. Daumet, pour l’architecture; M. Chaplain, pour la gravure; M. Reyer, pour la musique.
M. Gruyer représente les membres libres.
Le 12 de ce mois de novembre, la commission, ayant fixé son choix, le fera connaître.
M. Raoul Aubry a jugé l’occasion favorable pour interroger M. Guillaume (on n’interviewait guère dans sa jeu
nesse); mais comme celui-ci est l’affabilité en personne, et conserve toutes les traditions et les grâces de l’ancienne
politesse française, il a reçu le journaliste on toute aménité et lui a répondu sur toutes les questions qu’il lui plaisait de poser.
Nous ne citerons ici, bien enlondu, que quelques-unes des questions et des réponses.
— Ne projette-t-on pas quelques réformes à la Villa Médicis?
— Qu’appelez-vous des réformes?
Tel fut le début du dialogue. Pour naturelle qu’elle soit, la réponse était presque astucieuse, car tout le monde réclame des réformes, et nous ne cessons d’en réclamer aux dieux mêmes; le difficile est justement d’en préciser la nature et le sens.
Le journaliste s’en lira adroitement par cette remarque générale, peu compromettante et qui ne peut blesser personne :
— Nous appelons réformes cet incessant besoin qu’ont les hommes de changer ce qui existe, s’imaginant que ce qu’ils apporteront sera mieux...
Comme La Rochefoucauld lui-même n’eût pu exprimer une plus juste maxime, M. Guillaume s empressa d’acquiescer,
déclarant d’ailleurs que les élèves de Rome ont toute leur liberté. Etant libres, le besoin de réformes en leur faveur ne s’impose guère, estime le directeur de l’Ecole romaine :
— Ainsi, le pensionnaire se lève quand il veut. Quand une fois il est levé, il a devant lui un cadre harmonieux, de vastes jardins ; la poésie et les souffles inspirateurs montent de partout et l’imagination s’éveille.
En un mot, l’existence là-bas est une idylle; M. Guillaume pourrait bien avoir raison, lors même que les jeunes
2e Série. 10e Année. No 6.
XXe Année de la Collection.