10 DÉCEMBRE 1904
LA CONSTRUCTION MODERNE


ACTUALITÉS


A LA VILLA MÉDICIS
Remplacer le vénérable M. Guillaume à Rome n’est pas une opération commode, en l’année 1904 ; on ne Ta que trop vu. Si, comme on le disait en latin, ce fut une lourde tâche que de fonder Rome, c’en estime non moins délicate aujourd’hui que dénommer un directeur dans cette môme ville.
Ce n’est plus un mystère pour personne, — bien qu’on ait jeté sur cos dessous un voile discret, — que la difficulté est principalement financière. Une tradition, fort respectable en son temps, voulait que le directeur de l’Académie à Rome ilînl un grand état de maison, table ouverte, offrît des récep
tions, tout comme au temps où le cardinal de Bernis était làbas notre ambassadeur.
Or, le traitement accordé n’est nullement en proportion de ces exigences représentatives; tant s’en faut. C’est un honneur des plus lourds qu’il faut actuellement subir.
C’est donc une première réforme qui s’impose: ou bien il faudra attribuer à ces fonctions si honorables un traitement mieux approprié aux traditions décoratives; ou bien il faudra, dans une assez large mesure, renoncer à celles-ci.
Mais, à côté de cette première réforme, il en est d’autres non moins vivement réclamées depuis quelque temps, et qui touchent à l’organisation même do ce qu’on appelle sou


vent l’Ecole de Rome. Convient-il d’y faire droit, au moins en partie? C’est évidemment une très grave qucsLion.


Aussi l’Académie vient-elle de nommer une Commission spéciale qui étudiera les modifications à introduire dans les règlements concernant celte Ecole. Elle comprend:
Pour la peinture. MM. Bonnat et Cormon ; Pour la sculpture, M. Lenepveu ;
Pour l’architecture, MM. Daumet et Nénol; Pour la musique, M. Théodore Dubois;


Pour la gravure, MM. Chaplain cl Jacquet;


enfin, la section des membres libres sera représentée par MM. Gruyer et Guifïroy.
A en juger d’après ces choix divers, la tradition sera res
pectée comme il convient ; mais il y a grande apparence aussi que la Commission no se montrera pas rigoureusement hostile à toute idée d’innovation raisonnable.
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Nous avons mis sous les yeux de nos lecteurs les critiques, parfois exagérées et violentes, parfois plausibles, qui ont été lancées, pendant ces dernières années, contre l’institution de Rome, et, en même temps, les ripostes bien senties de ses défenseurs.
A ce sujet, on nous a parfois reproché d’ouvrir si libéralement nos colonnes aux partisans du pour comme aux partisans du contre. Nous n’en persévérerons pas moins dans cette manière de comprendre notre rôle. Ce sont surtout les esprits étroits qui ont la prétention d’imposer péremptoire
ment leurs opinions, jugeant le publie assez ignorant pour accepter et subir ces opinions toutes faites.
Nous avons meilleure opinion de nos lecteurs ; nous les croyons assez grands garçons pour se faire eux-mêmes leur opinion, à la condition, toutefois, qu’on leur présente, pour éclairer suffisamment leur jugement, tous les faits et tous les arguments de la cause à débattre.
C’est ce que ne font généralement pas les partisans de la manière forte et absolue, qui dictent le mot d’ordre et entendent qu’on obéisse à leurs décisions.
Nos lecteurs n’étant pas un troupeau qu’on mène à la baguotlo, nous croyons plus sûr de nous adresser à leur raison, en rapportant les dires de chacun. Le public a le droit d’être exactement et complètement renseigné; après quoi, il appréciera impartialement, comme il l’entend; nous n’avons pas à lui imposer un jugement tout fait.
Lorsqu’il nous semble à propos d’exprimer, à notre tour, des opinions personnelles sur d’intéressantes questions,
nous les produisons en tâchant de les appuyer par quelques bonnes raisons. Si l’on nous oppose d’autres arguments,


plus faibles ou plus solides, jamais nous ne refusons de les publier. Nos leclcurs ont pu maintes fois s’en apercevoir.


2e Série. 10e Année. No 11.
XXe Année de la Collection.