« Je pourrais, a-t-il ajouté, en parcourant tous les genres, montrer partout les beaux-arts en proie à la funeste influence de la critique insipide; sa lime sévère, persécutant à tort et à travers tout ce qui n’est pas de son goût; cherchant à dé
pouiller les objets de leurs qualités particulières pour ne leur laisser que des qualités vagues ou leur arracher le principe même de leur force et de leur beauté...
« Que répondre à cette presse qui, mal préparée et encore plus mal inspirée, jette scs pensées erronées comme des traits brûlants dans l’âme du lecteur et se laisse entraîner, souvent à tort, par le pouvoir qu’elle défient?... »
Vous pensez bien qu’on n’a pas laissé passer cette virulente protestation sans quelques marques d’approbation. Il y a eu des applaudissements ; la majorité de l’assemblée était visi
blement enchantée de la riposte du conférencier, et plusieurs ont, dans le même moment, témoigné par des sourires discrets que les paroles prononcées n’échappaient point à leur entendement.
Il est vrai que celte légitime mais momentanée satisfaction ne changera en rien le cours des choses; car il est manifeste que, tantque l’on ne découvrira pas le secret de rendre les esprits plus justes, tous les pas que l’on pourra faire dans la voie de la vérité, n’empêcheront pas les hommes, et parfois les critiquer, de raisonner faux.
Quoi qu’il en soit, M. do Baudot eut raison de ne pas s’y attarder outre mesure, et d’aborder immédiatement après son principal sujet qui avait pour titre : La conservation et la restauration des édifices.
Tout le monde, a-t-il dit en substance, n’est pas d’accord sur la manière dont il convient de conserver ou restaurer les édifices dignes d’intérêt.
Avant d’exposer sa façon de voir, M. de Baudot nous cite plusieurs faits amusants, tendant à montrer l’esprit qui avait cours à une époque relativement peu éloignée de nous. C’est ainsi qu’un inspecteur des Bâtiments civils, membre de l’Académie des Beaux-Arts, avait proposé de faire canneler les colonnes d’un monument du moyen âge, pour les rendre « belles comme les colonnes grecques »...
Une conférence faite jadis par M. Lucien Pâté sur la manière de sauvegarder les édifices, est rappelée ensuite par M. de Baudot avec éloges. On comprendra aisément cette marque d’estime lorsqu’on saura que M. Pâté avait dit de Viollet-Le-Duc, après avoir signalé l’important et quasi providentiel rôle qu’il joua comme architecte diocésain, qu’il était venu « à temps pour sauver les monuments historiques de la destruction... »
Suivant M. de Baudot, c’est à Viollet-Le-Duc que l’on doit la méthode-type en matière de restaurations, telle qu’il l’appliqua à Notre-Dame de Paris.
Tout le monde, aujourd’hui, rend justice au mérite très réel de Viollet-le-Duc; mais nous croyons savoir que sur cotte épineuse et très délicate question de la restauration des
édifices anciens, et sur la façon dont Viollet-le-Duc l’avait comprise, les avis sont plutôt partagés, et que M. de Baudot lui-même ne l’utilise pas scrupuleusement en pratique.


Quelle est, en effet, cette méthode?


Cathédrale de Bayeux : restauration ancienne.
Cathédrale de Bayeux : restauration moderne.