contemporains le temps de disparaître à leur tour, pour faire place à un commencement de postérité. Ce serait infiniment plus sage; un délai de dix ans serait vraiment bien court. Pourtant, on pourrait provisoirement s’en contenter, sim
plement parce que ce serait un premier acheminement vers des mesures plus prudentes encore. Aussi faut-il savoir gréa ce conseiller de s’être montré si raisonnable.
*
* *
Le baron Haussmann, qui fut proposé à son tour, n’a pas trouvé, pour lui ni pour sa statue, un accueil particulière
ment favorable. Les uns lui reprochèrent d’avoir donné des fêtes ; les autres, de n’y avoir pas invité le vrai et bon public qui, seul, y doit prendre part.
Quelques membres firent remarquer que l’on avait élevé une statue à Alphand; cette commémoration était justifiée,
dirent-ils; mais la statue est si mauvaise, ajoutèrent-ils, qu’on n’y saurait voir un encouragement à continuer par une statue du baron Haussmann.
Pour ces raisons très diverses, ainsi qu’on le voit, cet administrateur attendra, indéfiniment peut-être. Il doit lui suffire de posséder déjà un boulevard, honneur qui n’appartient pas à tout le monde.
Ce fut ensuite le tour de Benjamin Godard, musicien des plus estimables qui pourrait émailler une des pelouses du parc Monceau. Ce n’est pas que Godard ait jamais habité ce quartier, ni que ses mélodies aient le moindre rapport avec ce parc élégant. Mais, lui aussi, on ne saurait où le mettre; et puisque, en se serrant un peu, les grands hommes hospi
* *
Nous n y pouvons rien. Il ne nous reste qu’à féliciter chaudement l’aimable ville de Riom qui vient de donner un excellent exemple de charité confraternelle en offrant à la Ville de Paris de lui reprendre pour rien une statue dont celle-ci ne savait plus que faire.
Si toutes les villes départementales voulaient, comme celle-ci, prendre à leur charge tous les laissés pour compte de la statuaire commémorative, quel soulagement pour la capitale, et quel désencombrement!
Le monument-fontaine de Desaix, par Percier et Fontaine, avait depuis longtemps quitté la place Dauphine, transfor
mée par l’édification du Palais de Justice; il avait erré çà et là, et avait fini par trouver un refuge au Dépôt des marbres, dont nul ne trouble le silence du bruit de ses pas.
Pourquoi ce général avait-il été transformé en fontaine? Est-ce parce que l’associé de Percier portait ce nom; est-ce parce que l’on considérait alors la fontaine comme particulièrement lacrymatoire?
Nul ne le saura jamais. D’ailleurs est-il besoin de le savoir? L’intéressant est que la ville de Riom a demandé à la Ville de Paris de lui céder le général, sa fontaine, l’un portant l’autre; et que cette dernière a consenti à combler les vœux de la première.
Excellent exemple, dirons-nous; pourvu qu’il n’engage pas la réciprocité. Car si la capitale devait, à son tour, recevoir
les laissés pour compte de nos départements, que deviendrait-elle?
Du généra] Desaix il existait un second monument; il n’y avait là aucune exagération, car la gloire de Desaix est des plus pures. L’édicule n’en a pas moins eu une destinée plus
C’était une statue en bronze, installée à la place des Victoires, toute désignée pour une semblable destination. Seu
lement, en vertu des idées du temps, le guerrier y était représenté nu, absolument nu, « tout comme le discours d’un académicien ». C’est Musset, on lésait, qui n’avait pu trouver le moyen de mieux exprimer la complète nudité.
Pour des raisons faciles à concevoir, le général, qui n’avait pas même de caleçon en bronze, choquait, bien malgré lui, la pudeur des demoiselles circumvoisines. Plus tard, dit-on, ce bronze disparut et, remis à la fonte, a reparu sous figure de Henri IV, au Pont Neuf. Personne ne se doute plus de l’inconvenance involontaire qu’il avait commise à l’origine.
Nous signalons ce fait parce qu il pourrait offrir une issue avantageuse à l’encombrement par les bronzes des hommes d’Etat, encombrement contre lequel nous cherchons sans cesse à protester.
Après avoir attendu au moins dix ans, comme le réclamaient certains conseillers municipaux, le bronze attribué à un grand homme politique non oublié, resterait dix autres années en posture commémorative. Passé ce délai, il serait fondu de nouveau pour servir à une nouvelle glorification.
P. Planat.
Nous recevons la lettre suivante que nous nous empressons de communiquer à nos lecteurs.
Un concours a été ouvert par la commune de Maisons- Alfort en vue de la construction d’un groupe scolaire. Cin
quante architectes environ ont déposé des projets; ils avaient à élire deux membres du Jury, et cette élection a eu lieu le mardi 6 décembre courant.
Le vendredi 9 j’ai entendu dire, par hasard, que j’avais été désigné avec M. Laloux par le vote des concurrents; j’ai aussi entendu dire, non moins par hasard, que les opérations du Jury étaient fixées au jeudi 15.
J’ai aussitôt écrit à M. le maire de Maisons-Alfort, après avoir vu M. Laloux — qui n’était pas plus informé que moi,
— lui disant que, si je devais m’en rapporter à de vagues on-dit, j’aurais été élu par les concurrents, et que le jour du jugement aurait été fixé au 15 décembre; que sans doute ce devait être une erreur, puisque je n’avais reçu aucun avis
de la mairie; que cependant, et pour le cas où, contre toute probabilité, cette information serai t exacte, j’étais obligé de lui faire connaître que je n’étais pas libre le 15, et que
plement parce que ce serait un premier acheminement vers des mesures plus prudentes encore. Aussi faut-il savoir gréa ce conseiller de s’être montré si raisonnable.
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Le baron Haussmann, qui fut proposé à son tour, n’a pas trouvé, pour lui ni pour sa statue, un accueil particulière
ment favorable. Les uns lui reprochèrent d’avoir donné des fêtes ; les autres, de n’y avoir pas invité le vrai et bon public qui, seul, y doit prendre part.
Quelques membres firent remarquer que l’on avait élevé une statue à Alphand; cette commémoration était justifiée,
dirent-ils; mais la statue est si mauvaise, ajoutèrent-ils, qu’on n’y saurait voir un encouragement à continuer par une statue du baron Haussmann.
Pour ces raisons très diverses, ainsi qu’on le voit, cet administrateur attendra, indéfiniment peut-être. Il doit lui suffire de posséder déjà un boulevard, honneur qui n’appartient pas à tout le monde.
Ce fut ensuite le tour de Benjamin Godard, musicien des plus estimables qui pourrait émailler une des pelouses du parc Monceau. Ce n’est pas que Godard ait jamais habité ce quartier, ni que ses mélodies aient le moindre rapport avec ce parc élégant. Mais, lui aussi, on ne saurait où le mettre; et puisque, en se serrant un peu, les grands hommes hospi
talisés à Monceau pourraient lui faire une petite place, c’est là qu’on voudrait l’installer à demeure.
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Nous n y pouvons rien. Il ne nous reste qu’à féliciter chaudement l’aimable ville de Riom qui vient de donner un excellent exemple de charité confraternelle en offrant à la Ville de Paris de lui reprendre pour rien une statue dont celle-ci ne savait plus que faire.
Si toutes les villes départementales voulaient, comme celle-ci, prendre à leur charge tous les laissés pour compte de la statuaire commémorative, quel soulagement pour la capitale, et quel désencombrement!
Le monument-fontaine de Desaix, par Percier et Fontaine, avait depuis longtemps quitté la place Dauphine, transfor
mée par l’édification du Palais de Justice; il avait erré çà et là, et avait fini par trouver un refuge au Dépôt des marbres, dont nul ne trouble le silence du bruit de ses pas.
Pourquoi ce général avait-il été transformé en fontaine? Est-ce parce que l’associé de Percier portait ce nom; est-ce parce que l’on considérait alors la fontaine comme particulièrement lacrymatoire?
Nul ne le saura jamais. D’ailleurs est-il besoin de le savoir? L’intéressant est que la ville de Riom a demandé à la Ville de Paris de lui céder le général, sa fontaine, l’un portant l’autre; et que cette dernière a consenti à combler les vœux de la première.
Excellent exemple, dirons-nous; pourvu qu’il n’engage pas la réciprocité. Car si la capitale devait, à son tour, recevoir
les laissés pour compte de nos départements, que deviendrait-elle?
Non. La ville de Riom doit se montrer magnanime; elle doit garder son monument, sans rien envoyer en échange.
Du généra] Desaix il existait un second monument; il n’y avait là aucune exagération, car la gloire de Desaix est des plus pures. L’édicule n’en a pas moins eu une destinée plus
triste que celui de Percier et Fontaine, si généreusement recueilli par Riom.j
C’était une statue en bronze, installée à la place des Victoires, toute désignée pour une semblable destination. Seu
lement, en vertu des idées du temps, le guerrier y était représenté nu, absolument nu, « tout comme le discours d’un académicien ». C’est Musset, on lésait, qui n’avait pu trouver le moyen de mieux exprimer la complète nudité.
Pour des raisons faciles à concevoir, le général, qui n’avait pas même de caleçon en bronze, choquait, bien malgré lui, la pudeur des demoiselles circumvoisines. Plus tard, dit-on, ce bronze disparut et, remis à la fonte, a reparu sous figure de Henri IV, au Pont Neuf. Personne ne se doute plus de l’inconvenance involontaire qu’il avait commise à l’origine.
Nous signalons ce fait parce qu il pourrait offrir une issue avantageuse à l’encombrement par les bronzes des hommes d’Etat, encombrement contre lequel nous cherchons sans cesse à protester.
Après avoir attendu au moins dix ans, comme le réclamaient certains conseillers municipaux, le bronze attribué à un grand homme politique non oublié, resterait dix autres années en posture commémorative. Passé ce délai, il serait fondu de nouveau pour servir à une nouvelle glorification.
Et ainsi de suite, tant qu’il y aurait d’illustres politiciens.
P. Planat.
CONCOURS PUBLICS
Nous recevons la lettre suivante que nous nous empressons de communiquer à nos lecteurs.
Un concours a été ouvert par la commune de Maisons- Alfort en vue de la construction d’un groupe scolaire. Cin
quante architectes environ ont déposé des projets; ils avaient à élire deux membres du Jury, et cette élection a eu lieu le mardi 6 décembre courant.
Le vendredi 9 j’ai entendu dire, par hasard, que j’avais été désigné avec M. Laloux par le vote des concurrents; j’ai aussi entendu dire, non moins par hasard, que les opérations du Jury étaient fixées au jeudi 15.
J’ai aussitôt écrit à M. le maire de Maisons-Alfort, après avoir vu M. Laloux — qui n’était pas plus informé que moi,
— lui disant que, si je devais m’en rapporter à de vagues on-dit, j’aurais été élu par les concurrents, et que le jour du jugement aurait été fixé au 15 décembre; que sans doute ce devait être une erreur, puisque je n’avais reçu aucun avis
de la mairie; que cependant, et pour le cas où, contre toute probabilité, cette information serai t exacte, j’étais obligé de lui faire connaître que je n’étais pas libre le 15, et que