1er JUILLET 1905LA CONSTRUCTION MODERNE 2e Série. 10e Année. No 40.
XXe Année de la Collection.
M. Eugène Ménard aime à concevoir les choses d ensemble cl à les examiner méthodiquement. Co sont deux qualités dont il faut lui savoir gré.
Il nu lui a pas été difficile do constater que le Paris ancien et le Paris nouveau lui-même n’ont pas été conçus en prévi
sion de la formidable circulation qui les ont envahis depuis peu. Le cas est le môme pour la plupart des grandes villes,
cl tous les faits que l’on est obligé d’observer ici, toutes les modifications que l’on peut réclamer pour la capitale seraient tout aussi bien justifiés s’ils s’appliquaient à nos importantes cités.
Non seulement le « trafic » y devient plus considérable, mais il devient de plus en plus encombrant, obstruant peuton dire, si ce n’est même tout à fait dangereux, depuis que l’auto et le vélo se substituent aux vénérables et pacifiques véhicules d’autrefois.
Il suit de là que, si l’on veut permettre aux habitants do continuer à se mouvoir avec aisance et sécurité, on sera bientôt contraint de remanier sérieusement le réseau de nos voies publiques pour l’adapter à des conditions toutes différentes de ce qu’elles furent dans le passé.
Poursuivant donc patiemment et courageusement l’élude dans laquelle il tente d’adapter ce réseau aux besoins actuels, M. Eug. Ménard essaie, dans le plus récent fascicule qu il vient de publier, de tracer un programme raisonné des dispositions d’ensemble qu’il conviendra d’adopter dans un pro
chain avenir. Jusqu’à présent on s’est contenté de satisfaire, au jour le jour, à quelque nécessité devenue trop pressante,
litions; l’opération devra se faire avec do justes précautions.
S’il est des quartiers à masures insignifiantes et que 1 on peut abattre sans grand scrupule, il est des vestiges du passé qu’il no faut détruire à aucun prix. Car il ne faut pas faire table rase de ce qui nous retrace la physionomie de ce passé, sous
peine de substituer la monotonie d’une ville trop uniformément moderne à la diversité léguée par les siècles antérieurs. Et, grâce aux sévérités — justifiées d’ailleurs — des règlements do voirie dans des cités trop encombrées, cette monotonie est inévitable, presque autant que regrettable.
Le terrain est trop coûteux pour que l’on consente à perdre un pouce de la hauteur disponible; aussi nos voies récentes, malgré tout le luxe dont on peut les revêtir,
pcchent-elles tout d’abord par cette uniformité dans les hauteurs de combles, et ne sont-elles, forcément, que des tranchées rampant à travers des falaises dont rien ne peut rompre la trop parfaite régularité.
Nos rues manquent totalement de ces silhouettes dont surabondaient les étroites et tortueuses ruelles de nos pères.
Nous concédons à l’hygiène, aux facilités de transport, tous les avantages que l’on voudra; mais il faut avouer aussi que le pittoresque nous fait totalement défaut. Or, le pitto
resque est un don qu’il ne faut pas répudier de gaîté de cœur : il entre pour beaucoup dans l’aspect séduisant des villes.
Raison de plus pour ménager, avec un soin filial, tout ce qui peut conserver un accident heureux : un vaste et bol hôtel, une église et, en général, tout édifice, toute construction, tout monument digno de rappeler aux yeux ce qu’était la beauté telle que la comprirent nos devanciers aux diverses époques.
M. Ménard le sait fort bien, et, tout en désirant une ville aménagée pour nos besoins effrénés de locomotion,
il sait au besoin sacrifier la ligne géométrique, dontlcprétendu mérite serait d’être le plus court chemin, à la nécessité
de no rien détruire qui valût la peine d’être conservé. Puisse-t-il être entendu!
* *
Engageant donc son étude avec la méthode que nous signalions, l’auteur de la nouvelle brochure commence par se demander ce qu’est et ce que doit être cotte circulation à laquelle il faudra consentir tant do sacrifices. Circule-t-on dans tous les sens indistinctement? — Evidemment non; il y a donc plusieurs circulations qui n’ont ni la même direction, ni la même allure. Quelles sont-ellos donc?
XXe Année de la Collection.
ACTUALITÉS
TRANSFORMATION DE PARIS
M. Eugène Ménard aime à concevoir les choses d ensemble cl à les examiner méthodiquement. Co sont deux qualités dont il faut lui savoir gré.
Il nu lui a pas été difficile do constater que le Paris ancien et le Paris nouveau lui-même n’ont pas été conçus en prévi
sion de la formidable circulation qui les ont envahis depuis peu. Le cas est le môme pour la plupart des grandes villes,
cl tous les faits que l’on est obligé d’observer ici, toutes les modifications que l’on peut réclamer pour la capitale seraient tout aussi bien justifiés s’ils s’appliquaient à nos importantes cités.
Non seulement le « trafic » y devient plus considérable, mais il devient de plus en plus encombrant, obstruant peuton dire, si ce n’est même tout à fait dangereux, depuis que l’auto et le vélo se substituent aux vénérables et pacifiques véhicules d’autrefois.
Il suit de là que, si l’on veut permettre aux habitants do continuer à se mouvoir avec aisance et sécurité, on sera bientôt contraint de remanier sérieusement le réseau de nos voies publiques pour l’adapter à des conditions toutes différentes de ce qu’elles furent dans le passé.
Poursuivant donc patiemment et courageusement l’élude dans laquelle il tente d’adapter ce réseau aux besoins actuels, M. Eug. Ménard essaie, dans le plus récent fascicule qu il vient de publier, de tracer un programme raisonné des dispositions d’ensemble qu’il conviendra d’adopter dans un pro
chain avenir. Jusqu’à présent on s’est contenté de satisfaire, au jour le jour, à quelque nécessité devenue trop pressante,
sans se préoccuper de prévoir celle de demain et do mettre ce qu’on fait aujourd’hui en harmonie avec ce qu on sera obligé d’exécuter plus tard.
Evidemment, il faudra, en faisant cheminer les voies nouvelles à travers une ville bâtie, se résigner à bien des démo
litions; l’opération devra se faire avec do justes précautions.
S’il est des quartiers à masures insignifiantes et que 1 on peut abattre sans grand scrupule, il est des vestiges du passé qu’il no faut détruire à aucun prix. Car il ne faut pas faire table rase de ce qui nous retrace la physionomie de ce passé, sous
peine de substituer la monotonie d’une ville trop uniformément moderne à la diversité léguée par les siècles antérieurs. Et, grâce aux sévérités — justifiées d’ailleurs — des règlements do voirie dans des cités trop encombrées, cette monotonie est inévitable, presque autant que regrettable.
Le terrain est trop coûteux pour que l’on consente à perdre un pouce de la hauteur disponible; aussi nos voies récentes, malgré tout le luxe dont on peut les revêtir,
pcchent-elles tout d’abord par cette uniformité dans les hauteurs de combles, et ne sont-elles, forcément, que des tranchées rampant à travers des falaises dont rien ne peut rompre la trop parfaite régularité.
Nos rues manquent totalement de ces silhouettes dont surabondaient les étroites et tortueuses ruelles de nos pères.
Nous concédons à l’hygiène, aux facilités de transport, tous les avantages que l’on voudra; mais il faut avouer aussi que le pittoresque nous fait totalement défaut. Or, le pitto
resque est un don qu’il ne faut pas répudier de gaîté de cœur : il entre pour beaucoup dans l’aspect séduisant des villes.
Raison de plus pour ménager, avec un soin filial, tout ce qui peut conserver un accident heureux : un vaste et bol hôtel, une église et, en général, tout édifice, toute construction, tout monument digno de rappeler aux yeux ce qu’était la beauté telle que la comprirent nos devanciers aux diverses époques.
M. Ménard le sait fort bien, et, tout en désirant une ville aménagée pour nos besoins effrénés de locomotion,
il sait au besoin sacrifier la ligne géométrique, dontlcprétendu mérite serait d’être le plus court chemin, à la nécessité
de no rien détruire qui valût la peine d’être conservé. Puisse-t-il être entendu!
*
* *
Engageant donc son étude avec la méthode que nous signalions, l’auteur de la nouvelle brochure commence par se demander ce qu’est et ce que doit être cotte circulation à laquelle il faudra consentir tant do sacrifices. Circule-t-on dans tous les sens indistinctement? — Evidemment non; il y a donc plusieurs circulations qui n’ont ni la même direction, ni la même allure. Quelles sont-ellos donc?