hommes. Ils veulent dérober leurs travaux aux fugitives impressions de l’instant. C est dans le meme désir qu’ils convient leurs concitoyens à célébrer les actes décisifs de l’existence.
« Par delà les divergenceslégitimes desopinions, condition indispensable à l’équilibre social, il faut des heures de trêve où les citoyens se reconnaissent frères d’une même race, fils d’une même patrie, où le sentiment qui les réunira aux jours de péril ou de désastre les retrouve dans l’affirmation pacifique de l’espoir, nourri du labeur de tous.
« Nous rejetons, en conséquence, toute idéed’hostilité et de négation; nous ne sommes contre aucune confession religieuse ou politique. Notre pensée est toute morale et con
siste simplement, fraternellement, à inviter tous ceux qui ont le pouvoir de réunir les citoyens à rechercher avec eux des raisons toujours nouvelles de se réconforter en commun au profit d’une foi active dans l’œuvre de tous.
«C’est là que doit se manifester notre intervention: dans l’étude des idées et des moyens de réaliser la solennisation joyeuse et paisible de notre grandeur morale.
« Les sciences, les lettres, les arts, qu’avec raison nous pensons tenir une si grande place dans notre pays, n’ont aucune fête, aucune occasion forte où ils puissent affirmer leur unité. Ceux qui représentent ces formes de la pensée se trouvent séparés (en dehors des liens que crée entre eux leur travail même), sans joies communes. C’est par l’exemple de cet isolement si misérable que nous pouvons apprécier la douleur des autres groupes sociaux, dispersés eux aussi.
«Le repos qui suit le travail ne peut pas et ne doit pas prendre la forme de l’ennui. En outre des journées données à l’atelier, à l’usine, la communion humaine doit s’exprimer dans la joie. Il faut se grouper pour se réjouir comme pour produire. L’ennui des grandes villes, l’ennui du sombre et morne dimanche parisien, cet ennui de tous qui fait la division de tous, doit être combattu.
« C’esten remontantà la source des sentiments durablesde l’espèce humaine, que les hommes conscients des conditions de la vie actuelle découvriront des sources aussi nouvelles et éternelles, intarissables de foi enthousiaste dans l’harmonie de la destinée humaine.
Pour lo Comité indépendant:
Le Président d’honneur : Eugène Carrière.
Le Président: Charles Morice.


L’ÉLECTRICITÉ A PARIS


Nous avons l’électricité à Paris, mais il paraît que ce n’est pas le modèle du genre. Trois conseillers municipaux ont courageusement visité l’Autriche, l’Allemagne, la Hollande, inspectant soigneusement les installations étrangères, les comparant à ce que nous possédons afin d’en tirer des conséquences pratiques pour le régime futur. En effet, les con
cessions accordées viennent bientôt à terme et, en les renou
velant, le Conseil municipal prétend, avec raison, exiger les améliorations les plus récentes et en déduire d’heureuses économies pour la Ville et pour les contribuables.
Après ce voyage — on s’instruit en voyageant, — il paraît que les idées primitivement régnantes au Conseil se sont trouvées complètemeut modifiées. Il peste entendu que l’pn
devra reconstruire entièrement le matériel actuel, créer une nouvelle tarification ; mais, sur nombre de questions purement techniques, les idées précédemment admises vont se trouver profondémentmodifiées.
En ce qui concerne les moteurs, les turbines à vapeur devront prendre la place des anciennes machines à vapeur.
On avait pensé que des turbines de 5000 chevaux seraient suffisantes et avantageuses: mais d’après les rapporteurs ces prévisions devraient être portées à des chiffres plus élevés.
« Qu’avons-nous vu partout à l’étranger? disent-ils. Des turbines de 8.000, de 10.000 et de 12.000 chevaux fonction
nant parfaitement et permettant, en raison même de leur puissance, de réduire le nombre des usines et de réaliser des économies importantes. Comment de pareils faits ont-ils pu rester ignorés d’une commission spécialement constituée pour fournir à nos discussions une base solide, des documents précis, indiscutables?
« Que si on admettait qu’elle ne les a pas ignorés et que c’est par prudence seulement qu’elle s’est décidée, nous jugerions excessive une prudence qui peut conduire à des résul
tats désastreux. L’industrie électrique marche à pas de géant,
et nous avons pu recueillir d’un ingénieur belge l’aveu que son usine, dont les fondations sortent à peine de terre, est déjà démodée, en raison des progrès réalisés depuis l’adop
tion des plans primitifs; on devra sans doute refaire ces plans. Veut-on nous exposer à pareil aléa? »
De môme la tension électrique des courants ne peut plus être maintenue à l’ancien niveau. Actuellement on est con
venu de ne pas dépasser 100 à 110 volts; c’est le chiffre que l’on comptait conserver. Mais partout les conseillers ont
trouvé des tensions doubles de celle-ci sans qu’on ait à leur reprocher de sérieux inconvénients, tandis que les avantages économiques sont incontestables.
« Lorsque nous interrogeâmes nos hôtes sur la tension admise chez eux ;
« — Toujours 220 volts, nous répondirent-ils. « — Et ça marche?
« — Admirablement.
« Qu’en conclure? L’augmentation du voltage, réalisable avec les canalisations existantes, ferait plus que doubler leur capacité; elle étendrait singulièrement le rayon d’action
des sous-stations et diminuerait par conséquent le nombre de ces dernières. D’où une économie considérable. La commission qui admettait tout cela a cependant conclu au main
tien de 110 volts, en raison de ses expériences sur leslampes.
Or,comment admettre que des lampes, qui fonctionnent très bien à l’etranger, brûlent en France presque instantanément? »
Une autre question, non moins importante au point do vue du rendement et de l’économie, est celle de l utilisation à faire de la force électrique produite, pour d’autres usages que l’éclairage ordinaire. Jusqu’à présent, on n’avait guère que celui-ci en vue; dorénavant, on devra chercher à étendre l’emploi de l’électricité comme force motrice.
A l’étranger, dès à présent, la question est posée en termes inverses: la force motrice est devenue l’emploi principal, l’éclairage n’est plus que 1 utilisation accessoire,
Le degré « d’utilisation » d’un matériel électrique se mesure par la comparaison de ce que vend une usine avec ce qu’elle pourrait produire si elle était en marche continue. Et il va de
soi que plus la proportion est élevée, plus le rendement est avantageux. Or, que représente l’éclairage dans la consommation de l’électricité à Paris? A peine quelques heures par