Compétence en matière de litiges




entre architectes et municipalités L


a Construction Moderne a déjà examiné à diverses reprises les litiges susceptibles de s’élever entre les architectes et les municipalités qui leur con
fient des travaux (Voir notamment : 22 mars 1925, La situation juridique des architectes départementaux et
communaux ; 8 avril 1927, Architectes et Municipalités et 29 mai 1927, Honoraires pour projets de travaux com
munaux). Elle a indiqué notamment que l’architecte
peut se trouver vis à vis de la commune dans deux situations différentes : ou bien il n’est lié que par une convention passée en vue de l’exécution d un travail dé
terminé ; ou bien il est chargé à titre permanent de la surveillance et de la direction des travaux communaux.
Dans le premier cas, il agit à titre privé, comme il le ferait à l’égard d’un client quelconque ; dans le second cas, c’est un fonctionnaire.
Aussi les règles applicables aux litiges entre lui et la commune varient-elles selon que l’on se trouve dans l’une ou l’autre de ces situations. L’architecte qui a traité en cette qualité pour un travail déterminé a droit à des honoraires fixés soit par la convention, soit, à défaut, par les usages ; en cas de difficultés, il peut s’adresser au tribunal compétent. De son côté, l’architecte mu
nicipal est habituellement, rémunéré par un traitement
auquel s’ajoutent le plus souvent des honoraires pourcertaines catégories de travaux, construction neuves, par exemple. Mais il bénéficie de garanties spéciales en ce qu’il ne peut être privé de sa situation que dans des formes déterminées.
Cette différence de situation a une influence capitale au point de vue de la détermination du tribunal compétent en cas de litige.
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Un architecte est-il en difficultés avec une commune pour le paiement de ses honoraires ? Il doit alors s’adresser au Conseil de préfecture qui est compétent sur toutes les questions relatives aux travaux publics. Les travaux effectués pour le compte de communes ont ce ca
ractère de travaux publics. Aussi, tandis que s’il avait traité avec des particuliers l’architecte devrait s’adresser aux tribunaux de droit commun, il est tenu dès lors qu’il
s’agit de travaux communaux, de porter la contestation devant le tribunal administratif.
Mais, si l’architecte, au lieu d’avoir traité pour un travail déterminé, est architecte municipal, c’est-à-dire fonctionnaire de la commune, il ne peut plus réclamer ses honoraires devant le conseil de préfecture. Il se trouve dans la situation d’un fonctionnaire et ne peut re
courir qu’aux voies suivies par les fonctionnaires quand leurs traitement ne sont pas payés.
C’est ce que vient de décider le Conseil d’Etat dans un arrêt du 24 mars 1928. Un architecte avait été nommé architecte municipal de la Ville de Marseille et char
gé en cette qualité de la surveillance et de l’exécution de l’ensemble des travaux communaux : en outre de son traitement fixe, il lui était attribué des honoraires pro
portionnels au montant de certains des travaux effectués sous sa direction. Des difficultés s’étant élevées entre lui et la ville de Marseille au sujet, de la fixation de ses hono
raires, l’architecte avait saisi le Conseil de préfecture
des Bouches-du-Rhône qui s’était déclaré compétent et avait statué sur le fond du litige. Mais l’affaire ayant été portée en appel devant le Conseil d’Etat, celui-ci a an
nulé l’arrêté du conseil de préfecture et déclaré que ce tribunal n’était pas compétent.
Voici les termes de l’arrêt : « Considérant que si le « Conseil de préfecture est compétent, par application « de la loi du 28 pluviôse an 8, pour statuer en premier <( ressort sur les difficultés pouvant s’élever entre une « commune et l’architecte dont elle s’est, assuré le con
cours en vertu d’une convention spéciale pour l exécu
tion d’un travail déterminé, il n’en est pas de même « lorsqu’il s’agit d’un architecte, chargé à titre perma« nent de la surveillance et de l’exécution de tous les
travaux communaux ou de 1oute une nature de trait vaux ; qu’en effet, l’architecte qui fait l’objet d’une « telle désignation doit être regardé, quel que soit d’ail
« leurs le mode de rémunération adopté, comme ayant la « qualité de fonctionnaire municipal ; qu’il n’appar« lient par suite en pareille hypothèse qu’au Conseil « d’Etat de connaître les contestations qui peuvent inter« venir entre la commune et son architecte, notamment « en ce qui concerne le montant, des émoluments aux(( quels ce dernier peut prétendre, à la seule exception,
« toutefois, du cas où l’architecte municipal serait char« gé en dehors de ses fonctions normales de l’exécution
d’un travail spécial ayant fait entre la Ville et lui l’ob« jet d’une convention particulière ; considérant qu’en
« l’espèce le sieur __ a été, par arrêté du maire de Mar
« seille en date du 28 janvier 1903, nommé architecte « en chef de la ville et chargé en cette qualité de la « surveillance et de la direction de l’ensemble des tra
« vaux communaux ; que si la rémunération qui était « prévue en sa faveur par l’arrêté précité comportait,
« outre l’allocation d’un traitement fixe, l’attribution en « certains cas d’honoraires proportionnels au montant « des travaux exécutés, cette circonstance n’était pas de « nature à lui enlever sa qualité de fonctionnaire mu