A propos de l’accident de Vincennes
CORRESPONDANCE
Cet accident a vivement ému le public et nous publions quelques-unes des lettres que nous avons reçues ou qui nous ont été communiquées à ce sujet.
La C. M. n’entend que mettre sous les yeux de ses lecteurs les diverses opinions
Grande Masse de l’Ecole Nationale des Beaux-Arts 57, rue de Seine, Paris
Paris, le 22 octobre 1928,
Monsieur le Rédacteur en chef,
Nous vous serions très obligés si vous vouliez bien reproduire cette lettre dans votre journal, dans la mesure de vos disponibilités.
La catastrophe de Vincennes a ouvert bien des polémiques.
L’Association des Anciens Elèves et élèves de l’Ecole des Beaux-Arts, groupant un millier d’architectes diplômés par le Gouvernement, ou futurs diplômés, consi
dère que la discussion et la recherche des responsabilités font fausse route
On épilogue longuement pour savoir qui doit contrôler l’entrepreneur, qui doit contrôler la construction, qui doit contrôler les plans.
On oublie de poser la première des questions : Qui doit dresser ces plans ?
Celui qui doit avoir les qualités nécessaires pour étudier les plans, au triple point de vue de la meilleure uti
lisation du terrain, de la construction et de l’esthétique, celui qui doit avoir les connaissances tedhniques néces
saires, celui qui doit veiller à l’exécution parfaite de la construction jusqu’au moindre détail, celui enfin qui, responsable pendant dix ans aux yeux de la loi, doit être « le maître de l’œuvre »
C’est l’Architecte 1
Point n’est besoin de chercher quel organisme officiel doit contrôler la construction, l’entrepreneur, les plans, etc..., cette tâche qui exige de vastes -connaissances est celle de l’Architecte.
Et dèsi lors qui doit être contrôlé par l’Etat P
C’est Larchitecte, ou plutôt la profession même d’architecte.
Ce qui est étonnant c’est que chaque mois une douzaine de constructions ne subissent le sort de celle de Vincennes.
N’importe: qui peut construire sans contrôle, n’importe qui peut s’intituler architecte : double danger, la réglementation du titre s’impose et celle-ci réalisée, l interdiction de construire sans l’aide d’un technicien reconnu devra suivre.
Comment réglementer le titre d’architecte ?
Des études très poussées, de la Société Centrale des
Architectes, de la Société des Architeétes diplômés par le Gouvernement ont été soumises aux pouvoirs publics, ceux-ci les ont repoussés. Pourtant ces remarquables études étaient très larges d’esprit, respectaient les situa
tions acquises, n’étaient pas faites pour telle ou telle école et garantissaient enfin que celui-là qui aurait le titre d’architecte était digne de le porter.
Il tombe sous le sens, que si dix années d’études sont nécessaires pour acquérir un titre officiel -de l’Etat, il est particulièrement ridicule et dangereux qu’une sim
ple -carte de visite imprimée en 10 minutes, confère les mêmes droits.
Il a fallu pine catastrophe pour qu’un Ministère de l’Air soit créé.
Fasse que de cette autre terrible catastrophe sorte une réglementation sévère d’une des plus belles et plus complexes professions.
R. Lopez,
Architecte, Président de l’Association des Elèves et anciens Elèves des Beaux-Arts.
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Société Française d’Architectes, 17, rue Blanche, Paris
Paris, le 20 octobre 1928.
A M. le Ministre de l’Intérieur, Paris.
Monsieur le Ministre,
Au nom de notre Groupement, nous avons l’honneur de vous rappeler les diverses démarches que nous avons entreprises depuis deux ans dans le but « de ne délivrer les autorisations de construire qu’à des architectes membres de sociétés d’architectes ».
En effet, par votre lettre du 22 février 1928, vous avez bien voulu prendre en considération notre vœu, mais depuis aucune solution n’est intervenue de votre part.
Nous attirons particulièrement votre attention sur cette formalité de la plus haute importance et l’accident pé
nible de Vincennes où une -construction a été édifiée sans le concours d’un Homme de l’Art, et qui a produit
des victimes est une des meilleures preuves que notre intervention était nettement et malheureusement justifiée.
Notre Conseil d’Administration est à votre entière disposition pour étudier avec vos services compétents la réglementation qui s’impose.
Dans l’attente d’une réponse favorable,
Veuille? croire. Monsieur le Ministre, à notre plus profond respect.
Pour le Conseil d’Administration, Le Secrétaire général,
Guibebt.