L’Annexe du Grand Hôtel à Saint=Aygulf (Var)


par Henri BRET, Architecte D. P. L. G.


L


a Construction Moderne, toujours soucieuse de bien renseigner ses lecteurs, m’a envoyé cette an
née encore à la Côte d’Azur afin de réunir une
documentation importante sur le nouveau Casino de Nice: le Palais de la Méditerranée, œuvre des Architectes Dalmas qui, incontestablement, est l’ensemble moderne le plus intéressant réalisé jusqu’à ce jour en iFrance. Les Dalmas ont su concevoir une œuvre magistrale et pro
chainement « La Construction Moderne » pourra la faire apprécier par les Architectes et les Artistes.
Un voyage à la Côte d’Azur est toujours agréable et j’en ai profité pour faire encore un séjour assez longdans ce beau pays. Cette année, je me suis attaché à re
voir la Côte de Nice à Sainte-Maxime et Saint-Aygulf a retenu mon attention.
Saint-Aygulf est une petite station balnéaire charmante située dans le golfe de Fréjus, à 5 kilomètres de cette localité, entre la mer et la voie du petit chemin de fer qui relie Sainte-Maxime et Saint-Raphaël, celles-ci entre elles et à Hyères P.-L.-M. Saint-Aygulf a de larges voies tracées dans les pins et les eucalyptus et est desser
vie l’été seulement par la halte de Saint-Aygulf-Plage.
C’est une retraite agréable et tranquille, éloignée du bruit des autres localités et que les amateurs ont su dé
couvrir. On commence à y construire des Villas et il est facile de prévoir que dans quelques années cette nouvelle station balnéaire rivalisera avec Juan-les-Pins et Sainte- Maxime.
La plage est située au fond d’une crique plaisante, parsemée de rochers, et qui forme un petit port bien abrité.
On se ravitaille à Fréjus. Je me suis donc arrêté à Saint- Aygulf, j’ai visité quelques villas qui paraîtront aussi dans notre Revue et trouvé dans une petite chapelle des toiles de Carolus Duran.
J’y ai constaté le passage d’Henri Rret, l’auteur de la Villa « La Collinette », à Cannes, publiée par la Cons
truction Moderne (numéro 20 du 17 février 1929). Cet architecte a construit le Grand Hôtel de Saint-Aygulf qui a été surélevé d’un étage l’année dernière. On y a inau
guré, il y a peu de temps, une grande salle à manger en plein air ; ces salles sont à la mode. Une vaste pergola
avec dés colonnes jaunes, des bois rouges, des lattes et des canisses vertes forme un abri contre le soleil et donne un agrément de plus à cet Hôtel fréquenté beaucoup par les familles.
Malgré cette surélévation, dès l’année dernière, l’Hôtel était cependant insuffisant et le propriétaire, M. Foures, a dû faire appel encore à Henri Bret pour construire une
annexe. Cette annexe est située à l’angle de deux larges voies. Le bâtiment s’aligne au long de l’une d’elles, sa façade arrière est bordée par une pinède, tandis que l’une des façades latérales, celle que nous présentons, est presqu’en face du jardin du Grand Hôtel qui s’élève sur
l’autre côté de la route. Le Bâtiment est d’une grande simplicité et ΓArchitecte a su donner à cette façade un aspect très particulier, digne d’arrêter l’attention des voyageurs qui circulent en automobile.
Cette annexe se compose d’un rez-de-chaussée comprenant, un Hall d’entrée-Salon, un garage pour six voi
tures, des boxes fermés pour sept voitures, six chambres de chauffeurs, une office avec plonges et le logement du gardien et de deux étages où sont réparties une trentaine de chambres avec bain, toilettes, waters, lingerie, etc. La façade arrière, celle vue en perspective, s’étend au long de la pinède, qui est un vaste terrain où les grands arbres entretiennent de la fraîcheur et offrent aux clients un
ombrage apprécié. Des éléments bien composés rompent la grande longueur de cette façade ; mais les arbres ont empêché d’en prendre une photographie. La façade laté
rale, que nous publions à cause de son originalité, est la façade d’entrée ; en angle est le Hall-Salon. Les contreforts qui donnent plus d’assise, plus d’importance appor
tent une note régionale ; ces contreforts se retrouvent, en effet, souvent dans les constructions provençales. Un grand balcon couronne les portes d’accès au Hall. Les entrées, en angle, sont avec portes en fer martelé et gar
nies de glace, ces dernières agrémentant d’une pointe de luxe la grande simplicité de la composition architecturale.
Le Bâtiment est en briques du pays, avec des planchers insonores en ciment armé, les linteaux sont en même matériau et la couverture en tuiles plates de Bellevue. Les façades sont avec enduit rustique, de teinte ocre claire avec une large bande de couleur rosée formant une frise unie. Les volets et les menuiseries extérieures sont peintes en ton vert selon la coutume du pays. A noter la légèreté des fers des balcons du second étage, non par économie,
mais pour respecter la tradition régionale. Il faut sans doute attribuer la légèreté des fers employés autrefois en Provence, à la difficulté des moyens de communication qui, aujourd’hui encore, sont très restreints en cer
taines parties quelque peu accidentées et fort pittoresques et cette légèreté est conservée aujourd’hui par les architectes pour se conformer à la note primitive.
A. G.